MÉLENCHON : ON NOUS CACHE TOUT, ON NOUS DIT RIEN! ?
Ma chronique parue dans le numéro de Novembre de Causeur
On reproche souvent aux journalistes de ne s’intéresser qu’aux petites phrases pour faire du buzz.
Et si les politiques arrêtaient plutôt de dire des conneries ? Parce que là, je sature grave.
Inutile de revenir sur la mise en scène de la mélenchonesque perquisition ou sur le courage à géométrie variable de l’outre Jean-Luc, gonflée de son importance dès lors que gardes du corps et caméras garantissent sa sécurité et beaucoup moins guerrier lorsqu’il se retrouve à devoir assumer face au président ses accusations de xénophobie fièrement formulées quelques heures plus tôt.
Personnellement, je ne suis pas choqué par cette perquisition au service de l’enquête, qui doit être menée comme l’ont été celles visant monsieur Fillon ou madame Le Pen. En leur temps, les perquisitions opérées à leur encontre avaient réjoui l’insoumis en chef.
Ce qui me choque, c’est d’apprendre que Sophia Chikirou serait la compagne de JLM.
Non pour des raisons morales. Que leurs corps et leurs cœurs exultent, grand bien leur fasse. Je dirais même qu’il a raison de verrouiller sa vie personnelle, les mauvaises langues ont trop vite fait de badbuzzer.
Mais la verrouiller au point qu’on trouve un de ses principaux prestataires dans son lit à 7 heures du mat, quel choc !
(Elisabeth Levy, la patronne, n’était pas très chaude pour ce passage. « La fin de la vie privée, c’est la barbarie, m’a-t-elle dit. Je suis pour protéger le secret en toutes circonstances. Mais malheureusement, le chroniqueur est libre… »)
Eh bien moi, je ne suis pas pour le secret. Alors que Sophia Chikirou est accusée de malversations par des Insoumis du Média et de surfacturations pendant la campagne présidentielle, s’il s’avérait que monsieur Mélenchon était en couple avec elle, cela ne serait pas anodin.
Vous êtes d’accord avec ce que j’ai écrit jusque-là?
Je vous comprends, car c’est exactement ce que je pensais jusqu’à ce que la réalité me soit révélée.
Mes yeux se sont ouverts l’autre soir grâce à deux « Témoins de Mélenchon » qui faisaient du porte-à-porte dans mon immeuble pour porter la bonne parole. Et ce qu’ils m’ont appris est terrifiant :
rien de tout ce qu’on nous a raconté n’est vrai !
Il s’agit bel et bien d’un monstrueux complot politique ! On nous amuse avec ces éclats de voix et ces pantalonnades, mais voici ce qui s’est réellement passé.
Tout d’abord, il faut que vous sachiez que Léon Trotski n’a pas été assassiné. Adepte de randonnées dans la campagne mexicaine, Trotski nettoyait son piolet au retour d’une marche lorsque le coup est bêtement parti tout seul.
Une fois ce point d’histoire précisé, apprenez que, dans le louable souci d’économiser l’argent du contribuable, les juges ont décidé de mutualiser les perquisitions politiques. Une seule équipe, un seul lieu, et surtout… un seul coupable. Le gain est évident. N’ayant pas eu l’opportunité de perquisitionner le domicile de Richard Ferrand pour cette malheureuse polémique portant sur un bien acquis par sa compagne sans débourser un euro, puis loué aux Mutuelles de Bretagne, dont il était alors le directeur général, les magistrats ont décidé de dépayser une nouvelle fois l’affaire. Après Brest, Paris et Lille en un an, c’est donc finalement au domicile de Jean-Luc que les investigations ont été menées.
Grâce à cette astucieuse innovation procédurale, nous pouvons enfin mettre au crédit de notre nouveau président de l’Assemblée nationale l’absence totale du moindre commencement de preuve d’une infraction quelconque de sa part. En effet, à la suite de la perquisition, nous sommes bien obligés de convenir que ni vous ni moi n’avons appris quoi que ce soit de nouveau sur cette affaire, preuve de l’innocence de monsieur Ferrand.
Mais ça n’est pas tout !
Vous vous souvenez du coffre-fort de monsieur Benalla, qui a mystérieusement disparu dans la nuit suivant l’échec de l’ouverture de la porte de son domicile ? Vous vous souvenez que les policiers n’avaient finalement pas été en mesure de trouver un serrurier pour ouvrir la porte ni le matériel adéquat auprès de leurs collègues locaux. Il leur avait donc fallu attendre le lendemain matin pour leur perquisition surprise…
Eh bien, le coffre a miraculeusement réapparu dans le salon de Jean-Luc ! Des documents y ont été saisis. Et c’est à Mélenchon qu’on va tenter d’imputer les fautes de l’ange de Jupiter! Un complot vous dis-je !
Mais ça n’est pas tout !
Ces suppôts du régime ont fait pire !
Sophia Chikirou a été droguée, ligotée et déposée en catimini chez Jean-Luc en pleine nuit, à l’insu de son plein gré, par les sbires de la « Macronie » ! D’ou la stupéfaction bien légitime de Mélenchon, causée par la révélation par Mediapart de sa love story. D’où sa mise au point dans un Facebook live depuis un café le 20 octobre : Sophia Chikirou « n’est pas ma compagne ».
Mais ça n’est pas tout !
Je sais de source sûre que les enquêteurs ont pris soin d’intercaler entre chaque facture de Mediascop, présidée par Sophia Chikirou, les nombreuses ristournes de GL Events au bénéfice de la campagne d’Emmanuel Macron. L’éventuelle sous-facturation de l’un étant ainsi mécaniquement compensée par l’éventuelle surfacturation de l’autre.
Vous commencez à comprendre ? Vous voyez de quelle manière le pouvoir tente d’instrumentaliser les Insoumis à son seul bénéfice ?
Par conséquent, ne soyez pas dupe. Tout ce que l’on aura pu trouver à charge contre notre Maduro marseillais ne serait que montage et vile imposture.
Ne croyez pas que l’outing un poil homophobe de Gabriel Attal, (le tout nouveau et tout jeune secrétaire d’État auprès du ministre de l’Éducation nationale et de la Jeunesse) par maître Juan Branco, l’avocat de Jean-Luc, vienne réellement des Insoumis.
Comment pouvez-vous gober qu’une force de gauche, progressiste, ouverte et tolérante puisse tweeter : « Sympathique promotion-canapé pour Attal, pacsé à la ville avec le conseiller politique de Macron, qui récupère sans autre raison un maroquin ministériel» ?
De même, vous vous doutez bien que jamais Jean-Luc ne se serait moqué de l’accent du Sud-Ouest d’une journaliste.
Pas plus qu’il n’aurait demandé à Cohn-Bendit de le vousoyer alors que moult émissions antérieures le montraient tutoyant joyeusement Daniel.
Rien de tout cela n’est crédible, naïfs que vous êtes ! Vous voyez bien que ce n’est pas le vrai Jean-Luc qui parle !
Comment avez-vous pu croire qu’un homme de sa stature, aspirant aux plus hautes fonctions, pourrait s’afficher devant les cameras, yeux exorbités, voix détimbrée par une hystérique colère et postillons multidirectionnels sur les représentants de l’autorité ? Vous voyez bien que le pouvoir l’a kidnappé et remplacé par son hologramme depuis un bon moment !
Alors, tous avec moi, au nom du bien, de la démocratie, demandons la libération de “notre” Mélenchon, honteusement retenu dans les geôles de la Macronie ! Chantons ensemble « Jean-Luc reviens, Jeanan-Luc reviens parmi les tiens ».
Exigeons la destruction de cet être virtuel malfaisant qui tente de faire passer Jean-Luc pour un Jean Marie Le Pen de gauche : déni d’égalité devant la justice, complotisme, abus de pouvoir, culte du chef, toujours prompt à la phrase-choc, l’insulte facile et le mépris de la presse, si elle s’écarte de la ligne…
N’acceptons plus de laisser croire que JLM ne serait que l’anagramme de JMLP, avec juste un pet de différence.
Jean-Paul Lilienfeld (Paru dans le numéro de Novembre 2018 de Causeur et publié sur Quinquagenius et+ avec l’aimable autorisation d’Élisabeth Lévy et Gil Mihaely)