« Le génocide voilé » : 13 siècles, sans interruption, d’esclavagisme Arabo-Musulman
Le chercheur Tidiane N’Diaye , économiste et anthropologue, a écrit il y a 10 ans « Le génocide voilé ».
Sa parution aurait dû provoquer un séisme, surtout au Maghreb ou au Proche-Orient. Curieusement ?, il a été accueilli dans un relatif silence. Souvenons-nous qu’en 2005 l’historien des traites négrières Olivier Pétré-Grenouilleau avait été l’objet d’une campagne calomnieuse à la suite de la parution de ses travaux aux conclusions semblables à celles de Tidiane N’Diaye. Plûtot qu’à un lynchage en règle, ce dernier a eu le droit à un escamotage, plus subtil. Une sorte d’étouffement par omission…
Il faut dire qu’il est à la fois Africain et musulman. Difficile donc de l’accuser d’être mû par un racisme congénital comme ce fut le cas pour Pétré-Grenouilleau.
«Si l’inventaire des crimes commis par les Européens occupe à juste titre des pages entières [dans les livres scolaires], la main a tremblé dès qu’il s’agit d’évoquer les crimes commis par les Arabes» écrivait en 1981 l’historien Marc Ferro dans « Comment on raconte l’Histoire aux enfants à travers le monde entier » paru chez Payot, une histoire comparée des mentalités à travers l’étude des manuels scolaires.
Si l’Occident a reconnu la traite négrière comme étant un crime contre l’humanité, un grand silence règne dans le même temps du côté arabe. D’autant que ces exactions ne sont pas aujourd’hui totalement éradiquées mais adoptent d’autres formes de traite plus contemporaines.
Du VIIe au XXe siècle, l’une des études les plus sérieuses estime à plus de 9 millions le nombre d’individus déportés à travers le Sahara auxquels il faut ajouter 8 autres millions de personnes déportées en Afrique de l’Est (Mer Rouge et Océan Indien) soit un total de 17 millions d’individus.
Une question se pose alors. Compte tenu de l’importance de ces flux, comment se fait-il que l’on ne conserve pas trace aujourd’hui, dans les pays arabes, de descendants de ces esclaves comme cela est le cas en Amérique ?
On peut estimer à 13 millions le nombre d’esclaves déportés outre-atlantique entre 1451 et 1870. Le résultat est aujourd’hui une diaspora noire dynamique et forte de plus de 70 millions de personnes aux États-Unis, dans les Caraïbes et au Brésil.
Comment se fait-il que l’on ne retrouve pas l’équivalent dans les pays arabo-musulmans ?
La réponse est à la fois simple et épuvantable: les esclaves mâles étaient systématiquement émasculés afin d’empêcher toute procréation. Compte tenu des soins et de l’hygiène de l’époque, il s’agissait là encore d’un vrai massacre car on estime que seuls 30% de ces torturés restaient en vie.
Quant aux femmes – qui jouaient le rôle de servantes et d’objets sexuels – il était facile de faire en sorte que leur progéniture ait une espérance de vie très limitée.
C’est en cela qu’il s’agit d’un véritable génocide : un massacre délibéré de populations noires en grande quantité et, ce, pendant plusieurs siècles afin de profiter d’une main d’oeuvre économique.
Cette traite transsaharienne a profondément marqué l’inconscient collectif entre le nord et le sud du Sahara et explique qu’aujourd’hui encore dans certains pays tels le Liban, la Syrie ou l’Arabie saoudite, « les domestiques africains vivent dans des conditions d’esclavage. » dit-il. Elle explique également, selon lui, pourquoi « la fracture raciale est réelle en Afrique ».